L’art de générer vos propres questions dans un monde complexe

La tyrannie des réponses rapides

Nous vivons dans un monde d’urgence permanente. Dans l’entreprise, tout doit aller vite : les plans stratégiques, les réorganisations, l’innovation, la digitalisation. À chaque problème, une réponse immédiate est attendue. Mais il y a un piège : trop souvent, les entreprises s’appliquent à répondre aux questions des autres – celles posées par les concurrents, par le marché, par les médias, par les consultants. En faisant cela, elles perdent leur capacité la plus précieuse : créer leurs propres questions.

Poser ses propres questions : un acte stratégique

Une entreprise n’est pas condamnée à vivre dans le cadre imposé par son environnement. Elle peut choisir d’ouvrir de nouveaux horizons, en osant générer des questions inédites.

·       Et si nos clients attendaient autre chose que ce que nous croyons ?

·       Et si notre valeur ne se mesurait pas seulement en chiffres d’affaires, mais en impact global ?

·       Et si nous inventions un business model plus résilient face à la complexité ?

Ces questions ne sont pas des fuites hors de la réalité. Elles sont au contraire une manière de la prendre de face, avec courage et lucidité.

La complexité comme terrain de jeu

La tentation est grande de vouloir simplifier la complexité, de la réduire à des process et des KPI. Mais la complexité n’est pas un problème à résoudre : c’est le terrain de jeu du vivant, le lieu où émergent l’innovation et la résilience.

Une entreprise qui ose embrasser la complexité au lieu de la fuir devient plus agile, plus créative, plus robuste.

Mon expérience : des réponses… et des questions

Chez Decathlon, lorsque nous avons lancé la plateforme Innovation, la fameuse tente « 2 secondes » n’était pas une réponse à une question du marché. C’était une nouvelle question : "et si monter une tente pouvait être un geste aussi simple que claquer des doigts ?".

Chez Somfy, la transformation digitale (SmartHome) ne venait pas seulement de la volonté de répondre aux tendances technologiques. Elle venait d’une autre question : "et si la maison pouvait devenir intuitive, connectée, capable d’apprendre de ses habitants ?".

Chaque fois, la vraie valeur est née d’une question qui n’existait pas encore.

Une posture managériale à réinventer

Dans un monde où les réponses se ressemblent toutes, la différence vient de la qualité des questions posées.

·       Le rôle du leader n’est pas d’avoir toutes les réponses.

·       Le rôle du leader est de créer l’espace où les bonnes questions émergent.

·       Et d’engager son collectif à explorer ces questions avec audace.

Cela suppose une posture nouvelle : écouter, accueillir l’incertitude, accepter de ne pas savoir tout de suite. C’est une posture exigeante, mais elle est la seule qui libère les énergies.

Réinventer la création de valeur

Poser de nouvelles questions, c’est aussi repenser ce qu’est la valeur. La valeur ne se réduit pas au profit immédiat : elle inclut la résilience, l’impact humain, la capacité à contribuer à un monde durable.

Les entreprises qui survivront et prospèreront demain seront celles qui auront le courage de poser ces questions et d’y répondre par des modèles réellement créateurs de sens.

Alors, la prochaine fois que vous êtes tenté de chercher une réponse rapide, arrêtez-vous un instant. Demandez-vous :

Est-ce vraiment notre question ? Ou sommes-nous en train de répondre à celle des autres ?

La transformation ne commence pas par des réponses, mais par des questions. Les vôtres. Celles qui vous appartiennent, qui vous définissent, et qui vous donneront la force d’inventer l’avenir.